Grâce et souffrance
Par Tigreek le lundi 02 avril 2012, 22:52 - Oecuménisme au quotidien - Lien permanent
Eloi, Eloi, lama sabacthani... A la mode, cette phrase ? Oui, sans doute car c'est la période... Vivre la Passion tout en connaissant la puissance d'espérance de la résurrection... Jésus a-t-il douté sur la croix ?
Bien sûr que non, diront les exégètes de tout poil, qui auront reconnu le psaume 22 (21)... Ce psaume des ténèbres, basculant aux deux tiers pour finir en cri de louange, préfigure sans aucun doute aux yeux du chrétien le sort qui attendra Jésus.
Bien sûr que oui, disent les partisans de la théologie dyophysite[1] ! Puisque Jésus est tout homme, il faut bien qu'il aie connu le doute, lui aussi ; la peur, l'angoisse, jusqu'au tréfonds de lui-même, jusqu'au bout de ses convictions.
Et pourquoi cela n'aurait-il pas été un cri de souffrance mais aussi d'espoir ? De l'auto-persuasion pour passer au delà de l'épreuve qui consistait quand même, excusez-moi du peu, à mourir ! Ce psaume, il le connaissait forcément. S'il en connaissait le dénouement, peut-être l'a-t-il choisi précisément parce que sa situation, cloué au bois de la croix, correspondait au dénuement[2], à la supplique désespérée du psalmiste au début du texte.
Il est impossible de souffrir, de mourir à la place de quelqu'un en grande détresse physique, psychique ou spirituelle. Mais à ses côtés, peut-être est-il possible de rappeler ce psaume, et son verset charnière : "Tu m'as répondu !"[3]. Oui, la douleur est là. Elle est terrible. Opaque. Étouffante. Elle empêche de voir autre chose. Elle aveugle le cœur et l'esprit. Elle empêche de penser, de raisonner. Elle transforme tout autour, de mal en pis. Mais il y a quelque chose, après. C'est comme la fumée dans un incendie : elle est toxique, irrespirable, elle affaiblit, oblige à se courber, se baisser, aller presque jusqu'au sol. Mais si l'on peut lui échapper, dehors, il y a de l'air frais.
Il faut cheminer par la Passion. Mais nous, chrétiens, savons qu'au bout, il y a la Résurrection. Bonne semaine sainte.
Commentaires
Oui il y a de l'air frais. Bonne semaine sainte Tigreek!
Et ce qu'on apprend en premier quand on se forme au risque incendie, c'est de ne pas jouer au héros et ne pas aller chercher quelqu'un au milieu de la fumée... au risque d'étouffer avec. Protéger, sans se mettre en danger.
Je ne sais pas si le doute est nécessairement inhérent à la nature humaine. J'ai tendance à penser que non.
De la même manière que Jésus n'avait pas à la foi, parce que la foi est un acte de la personne et que la personne de Jésus est la deuxième Personne de la Trinité, et que Dieu ne saurait croire en lui-même, je doute (!) que Jésus ait douté. Même dans sa nature humaine.
Pour cette raison, j'évite d'utiliser les mots "croire", "espérer", "douter"... pour Jésus. Peut-être ai-je tort ? Toujours est-il qu'une grande prudence est de mise, je crois (!), dans leur utilisation pour le Fils de Dieu.
@Vianney : entre temps, Jean Baptiste Balleyguier a publié aussi sur la question, de façon autrement plus complète que moi...
Merci !
Résultat, je me suis fendu d'un long commentaire pour corriger un certain nombre de choses qui me semblent être des erreurs plus ou moins grandes ^^