Dans la ville, épargnée par les folies des promoteurs, il fait bon se promener parmi les maisons individuelles, serrées les unes contre les autres ou posées dans un écrin de verdure. Au fil des rues, chacune décline son identité, laissant imaginer au passant ce que peuvent être les habitants invisibles et leur caractère. Ici, c'est un couple, sans doute retraité, dans une maison bien sage, presque stricte, où chaque chose est à sa place, la pelouse à l'anglaise soigneusement taillée ; rien ne traîne, et on imagine aisément que dedans, tout est aussi bien rangé, dans un décor minutieusement pensé, épuré, presque minimaliste et tout en raffinement discret. Là, c'est une famille avec un chien : la pelouse est marquée par les empreintes de pattes et de pas, divers jouets sont semés un peu partout comme autant d'invitations ; aux fenêtres, des rideaux aux couleurs vives, et la porte ouverte du garage laisse entrevoir un joyeux bazar de matériel, vélos, jouets, vêtements remisés... A côté, c'est un amoureux du jardinage : dans un terrain plutôt vaste pour une ville, alternent fleurs et rangs de légumes ; la cabane qu'on devine au fond déborde d'outils et parfois, comme un escargot sort de sa coquille après l'averse, le propriétaire profite du soleil hivernal pour entretenir ses cultures. Il y a aussi la maison qui vient d'être rachetée : voilà un mois qu'elle est en travaux, on voit les camions amener des bennes, repartir avec des monceaux de béton, plâtre, gravats, puis les parpaings arriver, la physionomie de la bâtisse se transformer ; c'est une chrysalide, on attend que le papillon se montre !
On imprime à notre environnement ce que l'on est. Une même habitation occupée par deux familles différentes aura deux ambiances plus ou moins dissemblables. Je crois qu'il en est de même pour la foi : chacun "aménage" son coeur selon ce qu'il est. Bien sûr, il y a des ressemblances : dans chaque maison on trouve une cuisine, une ou plusieurs chambres, des toilettes ; dans chaque chrétien on retrouve la foi en la Trinité, la résurrection, le pardon. Mais David l'a déjà dit mieux que moi, chacun vit sa foi selon son caractère, construit et agence sa maison au fur et à mesure de sa vie. Parfois on commence par creuser les fondations, ça prend du temps, et le chantier peut être arrêté pour cause de mauvais temps... D'autres achètent une maison déjà faite, l'aménagent à leut goût... D'autres encore finissent par se rendre compte qu'ils étouffent dans leur propre coeur, alors qu'ils pensaient avoir bâti un palais ; alors ils rasent tout et recommencent.
Et puis, il y a les mélanges. Ceux et celles qui grandissent entre deux cultures, entre deux confessions ou religions. Une maison d'un genre nouveau : une église avec un minaret ; un temple avec des icônes... Ca peut paraître étrange, kitsch, voire vulgaire. Mais quand c'est sa propre maison... On y prend goût ! Alors, au moment de créer sa propre habitation, on demande un permis de construire, pour un temple avec un clocher. Mais les architectes ne l'entendent pas de cette oreille !
Imaginez... Lors d'un divorce, le juge demande aux enfants, dans la mesure de leurs capacités, de choisir s'ils veulent habiter avec leur père ou leur mère. Certains optent pour la résidence alternée, ce qui leur permet de profiter de deux ambiances différentes, et surtout de chacun de leurs parents, dans son environnement. Dans l'état actuel de l'oecuménisme, si l'on respecte les règles des clergés, la résidence alternée n'existe pas. Et pour moi, aucun enfant (et l'on reste toujours l'enfant de ses parents !) ne devrait avoir à faire ce choix.