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lundi 03 juin 2013

En travers de la gorge

Fête du Saint Sacrement ce dimanche. Avec évangile de la multiplication des pains. "Donnez-leur vous-mêmes à manger !". Dieu multiplie autant que nécessaire... A la seule condition qu'on mette un peu de nous-mêmes au départ !

Pour moi, c'est plutôt multiplication des douleurs. Car oui, l'intercommunion est, plus que jamais, absolument pas d'actualité. Et donc, pour des "métis" chrétiens comme moi, pour des familles multi-confessionnelles, pour les 90% des protestants qui ont épousé des catholiques, c'est toujours une déchirure.

Parce que l'Eglise catholique n'accepte l'accueil eucharistique qu'à de très rares exceptions.
Parce que les catholiques ne doivent pas entretenir la confusion en communiant à la Sainte Cène protestante.
Pas d'échappatoire. Pas de communion possible. C'est tout. C'est simple. Implacable. Douloureux.

Alors pardon Seigneur, j'ai eu un sourire ironique quand durant la prière eucharistique, le prêtre a évoqué l'unité à bâtir. Où est-elle, cette unité, quand on claque les portes sur les orteils qui essayaient de se glisser dans un entrebaîllement timide ?

Où est-elle cette unité, quand on pourrait avoir l'impression qu'il y a bien plus de raisons d'être écarté de la communion qu'il n'y en a d'y être accepté ? Divorcé remarié ? Ecarté ! Homosexuel non célibataire ? Ecarté ! Protestant ou mélangé ? Ecarté ! Avortée ? Ecartée ! Franc maçon ? Ecarté !

Il y a deux millénaires, un gars bien avait dit : "je ne suis pas venu pour les bien portants, mais pour les malades." (Marc 2, 17). Le même a choisi de donner, comme le dit la prière eucharistique, "le sang de l'Alliance nouvelle et éternelle, qui sera donné pour vous et pour la multitude, en rémission des péchés".

Et maintenant ?

C'est peut-être ça un jour de doute, c'est pas une chute de moral... C'est le besoin de vérifier que t'as encore bien la dalle !
Grand Corps Malade, Jour de doute

mercredi 14 septembre 2011

Taizé - Carnet de voyage - Dimanche 28 août 2011

Provocation ? Test ? Grande première ? Peut-être un peu de tout ça... Ou pas. Juste l'impression, profonde, d'être à ma place. A cet instant là, dans ce lieu là, dans cet esprit là. Puisque la communauté le vit comme cela, puisque j'en suis si proche...

Pendant l'eucharistie, j'ai vécu en catho. Je sentais bien mes camarades un peu perdus, à côté de moi, eux qui ne connaissaient que le culte réformé étaient surpris par mes gestes, mes répons... Les chants, ces fameux chants méditatifs qui rendent Taizé célèbre, rythmaient la messe. C'était un peu étrange, pour moi, de voir à quel point la liturgie peut, d'un coup, paraître "simple", lorsqu'on la vit ainsi. Multilingue : pas d'homélie mais le silence, celui qui permet de réfléchir sur le texte, revoir son moment de retraite, comprendre peu à peu la Révélation, dans toute sa profondeur.

Taizé, mélange des genres... Compromission ? Relativisme ? Ou juste vivre pleinement le fond de la foi chrétienne, sans fioriture, sans bisbille. Ici, personne ne demande la confession de l'autre. Ni son job, ses peurs, sa situation de famille... D'ailleurs, on ne demande pas, on offre. On offre à l'autre ce qu'on est. Et comme chacun fait pareil, tout le monde apprend de la façon la plus simple et merveilleuse qui soit, au contact de l'autre, des autres, autant qu'à celui du Tout Autre.

J'ai grandi, un peu. C'est le moment. Le bon moment. Communion. Première communion... Goûter, pour la première fois, au Pain de Vie. Surprise. Joie. A cœur ouvert. Pleine conscience de ce trésor que je vis.

Dimanche à Taizé, c'est aussi les départs. Larmes, séparations, sacs à dos, trafic intense. Une joyeuse ruche. Dont chaque abeille va aller porter du fruit. Chacune à sa place.

lundi 27 juin 2011

Première messe

Je n'avais encore jamais eu l'occasion d'assister à la première célébration de l'eucharistie d'un tout jeune prêtre... Je ne le regrette pas !

18h35. Un site de calcul d'itinéraires prévoit environ 20 minutes pour rejoindre l'église où Vianney va célébrer sa première messe. Si je me dépêche et qu'il n'y a pas trop de bouchons, je serai juste à l'heure...[1]

19h10. Les miracles sont toujours possibles ! Non seulement je suis à l'heure[2], mais en plus j'ai trouvé une place juste au pied de l'église...

Autant de paroissiens que d'amis et de membres de la famille constituent l'assemblée, sans parler des différents groupes de scouts... Et Vianney de rappeler que nous fêtons d'abord la présence et la résurrection du Christ... Il est solennel, majestueux, entouré de ses frères qui vont concélébrer avec lui.

Evidemment, sa première homélie n'a probablement pas grand-chose à voir avec celles qu'il fait d'habitude... Mais quels textes, et quelle argumentation ! Même si je pensais bien à suivre le même fil rouge que lui, dès que j'ai entendu la première lecture[3], je ne m'attendais pas à ce qu'il termine sur une telle apologie des espèces eucharistiques... Touché.

Alors, lors de la communion, j'ai choisi de m'avancer, bras croisés sur la poitrine. Ce geste qui m'est si difficile, qui me paraît tellement un geste de refus, par opposition aux mains tendues vers Celui qui se donne, devenait ici une évidence. Et contrairement à la croix sur le front des enfants, c'est une imposition des mains que j'ai eu la surprise et la joie de recevoir. C'est en tremblant et les lames aux yeux que j'ai retrouvé ma place...

Merci Vianney ! Que Dieu te bénisse, qu'il t'accompagne dans ce ministère, chaque jour.

Jubilez, criez de joie,
acclamez le Dieu trois fois saint !
Venez le prier dans la paix,
témoigner de son amour...
Jubilez, criez de joie,
pour Dieu, notre Dieu !

Notes

[1] Je tiens à m'excuser à l'avance auprès de PMalo, j'ai pris ma voiture pour voyager ce soir... Mais promis, j'irai voir ton frère à vélo dans sa nouvelle paroisse ! ;)

[2] Si, si, la messe est à 19h15 !

[3] Abraham demandant à Dieu s'il épargnerait Sodome et Gomorrhe s'il y trouvait ne serait-ce que dix justes ; ce qui fait immanquablement penser à Jésus, au don d'un seul juste pour sauver toute l'humanité !

dimanche 08 mai 2011

Retour(s)...

Du Japon. Après deux semaines de tourisme, de soutien, de discussion en franglo-japonais, de kendo[1], quelques heures d'avion, voilà une arrivée qui était attendue ! Avalanche de cadeaux et de surprises, de gadgets et de beaux objets, de câlins, rires, souvenirs, photos... Une famille un peu perturbée mais réunie, heureuse, prête à repartir sur un rythme (presque) retrouvé.

Au "doublé". J'étais en manque. De sacré, de liturgie, de célébration, de temps calme où retrouver Celui qui me nourrit. Hier lors de la célébration d'éveil à la foi des tout-petits, sur Saint François d'Assise, nous les parents insistions sur c'est en donnant qu'on reçoit ; oui mais pour donner, il faut avoir quelque chose en réserve ! Et mes réserves étaient épuisées. Alors quelle joie ce matin, d'assister, de nouveau, à la messe puis au culte... Deux communions, l'une de coeur et l'autre d'Esprit, l'une de désir et l'autre de partage : que demander de plus ?

Sur les Rameaux. Renvoi direct, en plein coeur, à ma propre prédication de cette montée vers Jérusalem. Ouvrir les yeux, suivre Jésus, l'annoncer : tel était mon plan, reprenant le texte narrant le voyage de Jéricho vers la ville sainte. Et aujourd'hui, même plan : commencer par ouvrir les yeux, ne pas rester aveugle, savoir le reconnaître. Puis suivre Jésus dans la Bible, demander l'aide de Dieu lui-même pour pouvoir comprendre ces écrits qui sont parfois si obscurs... Enfin l'annoncer, en revenant en arrière si besoin.[2]

Sur la liturgie comme expression vivante de notre foi. En seconde partie, pas de prédication en temps que telle, mais une revue de l'évangile du jour comme un résumé de la liturgie du dimanche... Ce fut une redécouverte, une autre façon de percevoir des paroles, des répons, une entrée en relation avec le Seigneur.

A la routine. Ou presque. Retrouver des habitudes, un rythme, calmer les angoisses, l'excitation. Reprendre une activité "normale". Ce sera pour demain...

Notes

[1] Escrime japonaise

[2] Il y a quand même un élément qui change : les disciples d'Emmaüs ont peur. Et Jésus leur apparaît, et ce n'est pas dit dans ces versets, mais il aurait pu aussi leur dire : "N'ayez pas peur"... Une phrase terriblement tendance en ce début de mai, n'est ce pas ?

dimanche 27 février 2011

De la transsubstantiation (et sa définition)

Dans mon billet précédent, Vianney a profité de la légère mention que j'ai faite à la page "mini-dico" de ce blog, pour donner un éclairage plus précis sur la définition donnée pour la transsubstantiation :

Et j'arrive au terme "transsubstantiation", dont je copie-colle la définition :
littéralement, la transformation d'une substance en une autre. Le terme désigne, pour certains chrétiens (en particulier les catholiques), la transformation du pain et du vin en chair et sang du Christ lors de l'Eucharistie.
Et je corrige : non, pas "transformation", car il n'y a précisément pas de passage d'une forme à une autre.
Saint Thomas reprendra la plus antique tradition chrétienne, attestée par nombre de Pères de l'Église, en parlant de "conversion" de la substance du pain dans la substance du Corps du Christ et de la substance du vin dans la substance du Sang du Christ. Dans conversion, il n'y a pas la notion de forme qu'on trouve dans "transformation".

Toute personne un brin initiée à la métaphysique distinguera aisément entre substance première (dont on parle ici) et substance seconde, ie. la forme (dont on ne parle pas ici, puisqu'elle ne change pas !).
Pour les autres, il suffit simplement de constater qu'entre avant et après la consécration, rien, absolument rien ne paraît avoir changé : ni le goût, ni la couleur, ni la forme géométrique, ni la teneur en alcool (ça, je vous le promets, moi qui dois parfois consommer la fin du calice !), ni... rien. En revanche, dans la foi catholique et la foi orthodoxe, dans la droite ligne de toute la succession apostolique depuis l'origine (je ne le dis pas pour chipoter, je le dis parce que cela va forcément de pair : la foi en l'un implique la foi en l'autre, et réciproquement), on croit que cela, qui paraît un bout de pain, que ceci, qui paraît un peu de vin, est maintenant cela, le Corps du Christ, et ceci, le Sang du Christ.

Je remarque d'ailleurs que la définition dit "chair" et non pas "Corps". C'est bien peu biblique. On préfèrera donc "Corps" à "chair", qui ne désignent pas précisément la même chose.

Comme précisé dans ma page, la définition que je donne n'est pas de moi (j'eus été bien en mal de le faire, craignant surtout un faux-sens théologique), mais de Wikipédia. Vous me direz, avec raison, que ce n'est pas franchement une source fiable et que j'aurais pu chercher ailleurs... Difficile, sans tomber dans une interprétation partisane du phénomène cité !

Ainsi donc, en sources neutres, je peux proposer :

Mediadico : [théol.] Changement miraculeux de la substance du pain et du vin en la substance du corps et du sang de Jésus-Christ dans l'eucharistie.

Wiktionnaire : (Théologie) Changement miraculeux de la substance du pain et du vin en la substance du corps et du sang de Jésus-Christ dans l’eucharistie.

Vous remarquerez que ces deux définitions sont rigoureusement identiques et reprennent celle du Littré.

Le TLFi donne : THÉOL. (CATH. ET ORTHODOXE). Dans l'Eucharistie, changement total de la substance du pain et du vin en la substance du corps et du sang du Christ au moment de la Consécration, alors que ces espèces restent les mêmes.

J'ai bien conscience que ces définitions peuvent paraître lapidaires et dénuées de tout le caractère de sacrement et de mystère (ou pas) que le terme implique. D'autres sites beaucoup moins neutres s'essaient également à la définition :

L'Église catholique en France : C'est littéralement la transformation d'une substance en une autre. Dans la théologie catholique, c'est la doctrine selon laquelle au cours de l'eucharistie, au moment de la consécration, les espèces du pain et du vin deviennent le Corps et le Sang du Christ tout en conservant les caractéristiques physiques et les apparences originales. Aujourd'hui, les catholiques préfèrent utiliser l'expression "présence réelle". Cette doctrine prend le nom de transsubstantiation au concile de Trente (1551) où elle est officiellement proclamée par l'Église catholique, prenant ainsi position à l'encontre de la consubstantiation envisagée par les protestants.

Je précise que la consubstantiation n'est pas "envisagée par les protestants", mais uniquement par une partie d'entre eux, généralement appelée (en France) les Luthériens ; Calvin allait plus loin en délaissant la notion philosophique de "substance" et affirmant la présence du Christ dans la Cène par l'action du Saint Esprit.

Par ailleurs, des évangéliques[1] donnent : La transsubstantiation est une doctrine de l'Eglise Catholique romaine. Elle est définie dans la section 1376 du Catéchisme catholique. (...) En d'autres termes, l'Eglise Catholique romaine enseigne qu'une fois qu'un prêtre ordonné bénit le pain de la Sainte Cène, il est transformé en véritable corps du Christ (bien qu'il conserve l'apparence, l'odeur et le goût du pain) ; et lorsqu'il bénit le vin, il est transformé en véritable sang de Christ (bien qu'il conserve l'apparence, l'odeur et le goût du vin). Un tel concept est-il biblique ? Il existe des passages qui, s'ils sont interprétés de manière strictement littérale, conduiraient à la "présence réelle" de Christ dans le pain et le vin. (...)
Les Catholiques romains interprètent ce passage littéralement et appliquent son contenu à la Sainte Cène, ce qu'ils désignent par "Eucharistie" ou "Messe". Ceux qui rejettent l'idée de la transsubstantiation interprètent les paroles de Jésus dans Jean 6:53-57 de manière figurative et symbolique.

Bref. Le concept est difficile, particulièrement lorsqu'on veut "jongler" avec dans un environnement œcuménique, car il s'agit d'un des principaux points de divergence qui existent entre protestants et catholiques / orthodoxes.

J'ai très vite fait connaissance avec ce terme. A l'âge de huit ans, quand les autres enfants du caté se préparaient à faire leur première communion, on[2] m'expliquait que je ne pouvais pas faire comme les autres, que mes parents avaient créé quelque chose de nouveau, qu'un jour je pourrai choisir, mais qu'en attendant... Je n'avais peut-être pas encore l'âge pour choisir, je pouvais continuer à faire le caté et l'école biblique, mais cette histoire de transsubstantiation était un truc vraiment trop gros et je ne pouvais pas faire comme si j'y croyais, si un jour je décidais que ce n'était pas vrai. A cet âge, je connaissais ce mot, savais ce qu'il impliquait pour moi, l'histoire du fossé qu'il creusait entre les deux Églises dans lesquelles je grandissais, alors que[3] beaucoup de catholiques adultes ignorent aujourd'hui ce terme, désignant le mystère du sacrement qui est au cœur de leur foi.

Enfin, un mot de ma pasteur ce midi, alors qu'on parlait d'une discussion, justement sur le débat transsubstantiation / consubstantiation : "ce sacrement de la division, on l'appelle communion..."

Notes

[1] Ce n'est pas moi qui le dis, c'est leur propre site, dans sa version anglaise

[2] Un 'on' pluriel qui figure les "grands", mère, prêtre, pasteur...

[3] et j'espère le dire avec aménité

vendredi 17 septembre 2010

Présence choisie

En centre ville, en pleine vie, l'église accueille ceux qui, la semaine de travail terminée, viennent reprendre leur souffle.

Dans les mains du prêtre, l'hostie se lève, ronde et claire. Les cris joyeux des enfants du square voisin se sont tus. Aucune voiture ne circule dans la rue longeant l'édifice. Le silence prend soudain toute son intensité, empli d'une Présence indescriptible. En plein dans le cœur...

- Ah non, tu ne vas pas remettre ça ?!
- Pardon ?
- Tes imbécillités sur la présence réelle, là... Tu vas nous faire un coup de trémolo ?
- Ce n'est pas de ma faute si j'ai une... certaine sensibilité...
- Sensibilité tu parles ! Tu te mets toi-même à moitié en transe en te faisant un film !
- Je te ferai remarquer que je ne "fais pas un film" à chaque fois. Cela faisait des mois que je n'avais plus ressenti cette présence pendant l'eucharistie...
- Ah ? Tu veux te faire remarquer, alors ?
- Comment ça ?
- Regarde-toi : tu serres les poings, tu trembles... Tu sais pertinemment qu'on va te voir.
- Tu ne me laisse pas profiter de cette présence ! C'est toi qui me crispes !
- Déjà que tu ne communies pas alors que tout le monde le fait...
- Ce n'est pas faute de vouloir, tu le sais aussi bien que moi !
- Mouais... Tu sais bien que d'autres ne prennent pas autant de gants avec le droit canonique, et qu'ils communient même s'ils ne devraient pas.
- Ce n'est pas comme ça que je le vois.

[...]

- N'im-por-te quoi !
- ??
- C'est le grand jeu...
- Comme tous les vendredis, tu sais que l'adoration me fait du bien. Laisse moi L'écouter.
- Mais ça devient grand-guignolesque ! Le bidule doré...
- Un ostensoir.
- Si tu veux. Les bougies, tout le monde à genoux devant cette hostie, à chanter "Jésus"... Tu sais que les réformateurs tiennent cela pour de l'idolâtrie, non ?
- Ce n'en est pas. Je le sais, je le sens. Arrête de vouloir me mettre mal à l'aise...
- Prier Dieu, je veux bien. Mais Imaginer Jésus là-dedans, c'est trop pour moi.
- Tu as une façon de penser tellement rationnelle...
- Et toi, tu suis trop tes sensations ! La foi c'est pas un ressenti, on te l'a déjà dit pourtant !
- La foi n'empêche pas le ressenti, laisse-moi en profiter lorsqu'il se présente !

[...]

- Hum...
- Quoi encore ?
- Le chapelet en plastique rose accroché sur la statue de la Vierge à l'enfant, c'est le top du ressenti ?
- Euh... Je ne sais pas d'où ça vient. Le kitch n'empêche pas la foi, si ?
- T'avoueras que ces gens qui viennent se planter devant Marie pendant la messe, c'est quand même pas très logique !
- Chacun approche Dieu comme il le peut, même si ce n'est pas notre façon de voir les choses...
- Notre ?
- Oui. Si tu te mets autant en colère contre moi, c'est peut-être parce que ça te touche aussi.
- C'est surtout que je pourrais être au temple, à prier avec Henri, Gisèle et les autres !
- Mais je n'ai pas le don d'ubiquité. Pas davantage aujourd'hui qu'hier.
- Et choisir, c'est renoncer.

Dehors, les panaches gris moutonnent dans le ciel flamboyant des lumières du couchant. Le tabernacle refermé, l'église plonge dans l'obscurité. Une légère lueur éclaire doucement le fond du chœur. Et la flamme rouge qui oscille.

samedi 21 novembre 2009

Temps de repos

D'abord l'eucharistie. Messe de la semaine, messe dite "basse", sans chants mais avec toujours autant de ferveur, autant d'actions de grâce (la signification du mot eucharistie en grec). Moins de monde, cérémonie plus "intime", on distingue la voix de chacun dans les réponds, celle chevrotante de la fidèle ancienne, celle de basse tonitruante du jeune père de famille, celle toute timide de la nouvelle paroissienne qui vient pour la première fois...

Puis le silence... habité. Sa présence à l'autel, les chuchotements du prêtre qui donne le sacrement de réconciliation, les bruits qui arrivent filtrés de l'extérieur... Il n'y a plus personne, seulement une présence, quelque chose d'indéfinissable... Temps donné, temps d'apaisement, d'ouverture, temps d'abandon, de confiance. Laisser de côté ses protections, ses peurs, se laisser imprégner de l'amour dispensé largement.

Et puis repartir. Pour un week-end, une semaine... Retrouver sa famille, ses proches, ses collègues, profiter de ce temps pour soi pour mieux se donner aux autres... Essayer de faire mieux à chaque fois ! Même si ce n'est pas facile, même si Dieu est exigeant. N'est-ce pas l'exigence qui fait la beauté de cet Amour là ?

dimanche 07 juin 2009

Quinze mille personnes rassemblées pour la Trinité

C'était grand. C'était sympa. C'était beau. C'était émouvant aussi... Aujourd'hui, dans le diocèse de Versailles, plus de trois cents adultes recevaient la confirmation catholique, et pour certains, communiaient pour la première fois.

Un rassemblement autour de la Trinité : c'est important ! Dans les ateliers du matin, on a parlé du Père, du Fils, de l'Esprit sous différentes formes. Dans l'atelier de théologie (appelé "mystère de la Trinité" : le mot "théologie" fait peur ?), on a utilisé des noms savants, parlé de kérygme, de périchorèse... On a évoqué les points communs entre les différentes confessions chrétiennes : ça m'a fait chaud au coeur de voir que d'autres s'intéressent à la Trinité vue par les protestants ou les orthodoxes. Du coup, on a parlé baptême et credo, puisque ce sont deux manifestations de la foi chrétienne, communes à toutes les confessions.

A midi, repas rapide en retrouvant chacun sa paroisse. Echanges, enthousiasme des enfants qui revenaient de Triniland avec leurs bandeaux colorés et leurs ballons-visages... Rapidement, la logistique reprend le dessus : il faut plier les gaules, se rassembler pour le grand temps fort de la journée : la célébration !

Une partie de l'assemblée sous le chapiteau (le plus grand d'Europe, parait-il), l'autre dehors, une estrade dehors et un autel dedans... Pendant que les paroissiens trouvent leur place et commencent les chants de louange, les prêtres, diacres, séminaristes, servants d'autel, enfants de choeur s'habillent et s'organisent en procession. Ils défilent tous, dans le chapiteau d'abord, puis jusqu'à l'estrade dehors ; icône de la Trinité en tête, les diacres et prêtres embrassent l'autel puis s'assemblent à l'extérieur. Accueil, chants, lectures : pendant le psaume, de jeunes handicapés me donnent les larmes aux yeux en faisant de l'expression corporelle sur le refrain... Un très bel alléluia précédant la lecture de l'évangile, et c'est l'homélie. L'évêque insiste sur l'importance de vivre nos vies de baptisé(e)s, de laisser oeuvrer en nous l'Esprit : "la grâce nous précède".

Après l'homélie, les célébrants regagnent le chapiteau, suivis des confirmands. Moment fort de la chrismation, où chacun de ces adultes reçoit la marque du Christ, l'effusion de l'Esprit des mains de l'évêque ou d'un prêtre ! Les visages, retransmis sur écrans géants, traduisent l'émotion de cet instant. L'Eucharistie qui suit est également très belle, même si je souffre toujours de ne pouvoir y participer pleinement ; j'en souffre d'autant plus que cet évêque qui a consacré le pain et le vin est le même qui m'a exprimé son refus de me voir communier au Christ, y compris à l'occasion d'un baptême, sacrement pourtant commun et... trinitaire.

La bénédiction et le chant d'envoi se déroulent... sous la pluie, qui nous avait épargné jusque là. Les paroisses en extérieur sont évacuées le plus vite possible vers les bus, mais ont le temps d'être mouillées... Dans le chapiteau, à l'abri, nous attendons notre tour, en compagnie de chants et du commentaire de l'organisateur qui nous donne les nouvelles. Enfin, c'est à nous de rejoindre le portail d'entrée, puis le bus, qui nous ramènera à nos pénates.

Gloire au Père, au Fils, et au Saint Esprit ! Amen.

mercredi 20 mai 2009

Finalement, c'est non

Ah, ils ont de l'humour, ou alors ils aiment jouer au ping-pong... Souvenez-vous : lorsque j'ai évoqué un possible accueil eucharistique à l'occasion du baptême de ma fille, le curé m'a conseillé d'écrire à l'évêque, ce que j'ai fait. La réponse ne s'est pas faite attendre, mais est décevante et ambigüe : ni oui, ni non, me renvoyant auprès du curé. Soit. Je m'en vais donc écrire un mail au curé, qui me répond "Il faudrait que vous en parliez avec le prêtre qui célèbrera le baptême".

Là, je commence à m'impatienter, mais passons. Ce soir, j'ai rencontré le prêtre avec qui nous allons, effectivement, préparer la cérémonie baptismale. Lorsque je pose la question de la communion, il tente lui aussi d'éluder : "le curé vous a donné la réponse de l'évêque ?", à quoi je réponds par la négative.

Alors, l'air un peu coupable (ou gêné, je ne sais), il m'explique que l'évêque n'est pas vraiment pour ce genre de pratique (j'avais cru comprendre), et qu'il (le prêtre) n'est pas autorisé à pratiquer officiellement un accueil eucharistique. Quand je lui fais remarquer que l'accueil à la table eucharistique se pratiquait il y a 25 ans, il me demande si c'était de façon officielle. Oui, tout à fait officielle, avec dérogation de l'évêque, et invitation du prêtre pendant la messe, à ce que tout le monde puisse communier...

Mon insistance le contrarie. Je ne veux pas encore penser que tout est perdu. Pour moi, c'est un coup de massue, le recul dont parlait Authueil et auquel je ne voulais pas croire. Il finit par me répondre que "chacun est libre de décider en son coeur s'il communie ou pas", mais qu'il "ne peut pas rompre la communion avec son évêque". C'est une réponse que je trouve bâtarde, et je lui dis : officiellement, on refuse catégoriquement, officieusement, aucun prêtre ne me refusera le Corps du Christ si je me présente devant lui.

J'abandonne. Nous prenons les dates pour les réunions de préparation au baptême. Pour la célébration du baptême lors de la messe (plutôt que juste après, en comité restreint), là aussi, impossible de négocier.

Je ressors en état d'hébétude. Je n'arrive pas à me faire à l'idée que c'est non, et non négociable. Sans entretien, sans discussion. Pourquoi une ouverture qui se pratiquait il y a une vingtaine d'années, ne s'imagine même plus maintenant ?? Les protestants, après avoir été des frères, seraient redevenus des hérétiques ? Au gré des monarques, on a eu l'Edit de Nantes et puis sa révocation ; au gré des évêques, on met en place Vatican II et puis on laisse tomber ?

Je ne peux m'empêcher de penser à la levée d'excommunication des lefebvristes : eux sont de nouveau accueillis à la table du Christ, tandis que les protestants en sont bannis, et ce alors que le dialogue de l'Eglise catholique avec les traditionnalistes me semble plus mince et plus récent que celui qu'elle peut avoir avec les protestants...

Les mariages interconfessionnels sont possibles depuis Vatican II. L'Eglise catholique ne se doutait-elle vraiment pas qu'un jour, des hybrides comme moi apparaîtraient ? J'ai une double culture et on ne peut pas me l'enlever. Je refuse d'abdiquer l'une pour l'autre, je souhaite continuer à pratiquer ma foi plurielle. Quelle place puis-je avoir dans l'Eglise ?

jeudi 14 mai 2009

La réponse

J'ai reçu la réponse de l'évêque concernant ma demande d'accueil eucharistique lors du baptême de ma fille. En voici la teneur :

J'ai bien reçu la demande que vous m'avez présentée d'hospitalité eucharistique à l'occasion du prochain baptême de votre fille, N. Je vous adresse à votre curé, le P. O.S., qui connaît bien la situation ecclésiale de votre foyer et saura vous conseiller.
Je vous assure de ma prière pour [votre foyer] et la petite N. et confie au Seigneur votre vie ecclésiale pour qu'elle se développe dans le sens de l'unité que Dieu veut pour son Eglise.

Voici ce que j'appelle "botter en touche". Cependant, je ne vais pas crier avant d'avoir mal. Ce n'est qu'une réponse un peu évasive, m'invitant à me rapprocher du curé de ma paroisse. Le même curé que celui qui m'a recommandé d'écrire ma demande à l'évêque... J'ai juste un tout petit peu l'impression de faire la balle de ping-pong.

Je vais donc m'atteler, dans les prochains jours, malgré cette réponse peu encourageante, à prendre contact avec le curé, et le prêtre qui va célébrer le baptême. Essayer de faire preuve de pédagogie, de diplomatie, de calme (ça, ça risque d'être un peu difficile). Expliquer ce qui n'est pas imaginable pour quelqu'un qui ne se trouve pas en situation interconfessionnelle : qu'un couple, et à plus forte raison un foyer comprenant des enfants, a besoin d'un équilibre, d'une harmonie, y compris au niveau spirituel. Et cette harmonie est consolidée par le soutien mutuel de nos églises.

Pour information, voici un paragraphe des textes de Vatican II sur l'Eucharistie et les "frères séparés" :
Vatican II, Unitatis Redintegratio, §22

Certes, les Communautés ecclésiales séparées de nous n'ont pas avec nous la pleine unité dérivant du baptême, et nous croyons, surtout par suite de l'absence du Sacrement de l'Ordre, qu'elles n'ont pas conservé toute la réalité propre du Mystère eucharistique. Néanmoins, en célébrant à la Sainte Cène le mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur, elles professent que la vie consiste dans la communion au Christ et elles attendent son retour glorieux.

dimanche 10 mai 2009

Colère

J'ai préparé une lettre à l'évêque. C'est la procédure : c'est lui qui peut décider d'ouvrir l'Eucharistie à des non-catholiques, de façon exceptionnelle, selon le droit canon. Pour le baptême de ma fille, je souhaite pouvoir participer à l'Eucharistie, et que les protestants de ma famille puissent le faire également. Alors j'ai préparé ma lettre.

"Ca mérite réflexion. On peut se voir ?", m'a répondu un des prêtres à qui j'ai demandé conseil avant d'envoyer ce courrier. Ainsi donc, un soir, je vais le rencontrer au presbytère. Je lui ai déjà parlé de ma situation d'hybride d'Eglises, en lui disant que je souffrais de ne pas pouvoir participer à l'Eucharistie. Il m'a déjà donné sa position : pour lui, être un mélange, c'est n'être rien, parce qu'on ne peut pas se réclamer de deux identités à la fois.

Effectivement, d'entrée de jeu, il me confirme son point de vue : l'accueil eucharistique n'a aucun lieu d'être, dans le sens où chacun a son Eglise, ses positions, et que l'Eucharistie n'a, selon lui, aucun sens chez les protestants, surtout pas le même que pour les catholiques. S'il était à la place de l'évêque, il refuserait ma demande. Hein, quoi ? Ai-je bien entendu ? Oui. Nous sommes bien en 2009, le concile Vatican II n'a jamais que 45 ans d'existence, et un (jeune) prêtre revient sur l'ouverture entre Eglises...

Je comprends bien que nous sommes dans une époque et une région où les religions, quelles qu'elles soient, sont attaquées. Je comprends que les croyants, en particulier les convertis adultes, aient un besoin d'identité religieuse forte. Je comprends leur crainte : celle que l'Eucharistie soit dévoyée, et que le plus grand mystère de l'Eglise catholique soit mal interprété, perde son sens dans l'ouverture.

Mais qu'à leur tour, ils comprennent mon dilemme ! Qu'ils essaient de prendre la mesure de la conciliation que je propose : non, je ne demande pas à ce qu'on gomme les différences entre les confessions ; non, je ne souhaite pas minimiser l'importance de l'Eucharistie, l'édulcorer en la rendant accessible à des non-catholiques ; mais comment peut-on imaginer faire progresser le dialogue oecuménique, si on n'ouvre pas ses portes aux autres ?